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L’ARMÉE ET LE TRAVAIL MANUEL

cette admirable doctrine du « rôle social de l’officier » exposée il y a près de quinze ans dans les colonnes de la Revue des Deux Mondes a été, à Madagascar, le collaborateur infatigable du général Gallieni. Son appréciation a donc une valeur particulière. Le général s’en prend d’abord à l’auteur de « Français et Romains en Afrique » et lui reproche de méconnaître l’œuvre accomplie par nos troupes au cours de la conquête et depuis. « Ce rôle des armées coloniales tel qu’il est tracé à l’actif des Romains ce n’est pas autre chose que ce que nous appelons entre coloniaux la doctrine Galliéni. Nous avons eu des précurseurs, le maréchal Bugeaud notamment. Il est notoire que le maréchal a employé l’armée dans une mesure aussi large que les Romains aux premiers travaux d’utilité publique de l’Algérie, non pas seulement militaires mais civils ; le noyau de la plupart des villes algériennes actuelles a été tracé par nos officiers et construit par nos soldats. Quant au général Gallieni, il a trouvé comme dans la légion romaine des « terrassiers, des maçons, des peintres, des architectes, des ingénieurs » autant qu’il en a voulu. Tout soldat entre ses mains « se doublait d’un ouvrier » et il ne jugeait pas lui non plus que leur valeur militaire en fut diminuée. Ici, dans le Sud oranais, j’ai trouvé les mêmes principes en honneur mais nous les avons poussés, mes officiers et moi, à l’extrême limite du possible. Toutes nos troupes, en dehors des périodes d’opérations et de reconnaissances, sont occupées sans discontinuité à des travaux publics ». Le général énumère les résultats obtenus : « c’est la localité de Beni-Ounif qui, en deux ans et demi, a poussé comme un champignon aux portes de Figuig et est devenue un centre de trafic important, un vrai marché-franc ; tous les bâtiments administratifs, mairie, justice de paix, marchés, abattoirs, réservoirs et tous les travaux de voierie ont été faits exclusivement par les soldats. C’est Bechar, terminus de notre occupation aboutit le chemin de fer et qui, occupé depuis dix-huit mois seulement, a aussi boomé comme une ville américaine et draine actuellement une partie du commerce du Tafilelt : école, mosquée, poste, fondouk, tout a été construit par les troupes qui y travaillent encore. C’est le chemin de fer qui a été établi par les Ponts-et-chaussées et poussé de 120 kilomètres en un an et auquel la main-d’œuvre militaire a largement collaboré grâce à l’entente étroite qui existe ici entre tous les services sans distinction d’habits. C’est Aïn Sefra qui, détruit par l’inondation, vient d’être rebâti presque entièrement. Ce sont les routes d’Aïn Sefra à Ounif et de