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CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

effets de cette réforme qui nous apparaît simplement comme une tentative énergique de réaction contre l’ingérence étrangère.

Depuis plusieurs années, le Chah s’était entouré de conseillers européens parmi lesquels un Belge, M. Nausse, ministre des douanes. Son administration réprima quantité d’abus et fit par conséquent de nombreux mécontents parmi les puissants bénéficiaires de l’ancien régime, s’attirant au contraire une foule de partisans dans les classes populaires. Les prêtres, les mollahs, réactionnaires forcenés, ennemis-nés des Européens, virent ainsi peu à peu leur influence décroître d’autant plus aisément que les Persans, raisonneurs et sceptiques, témoignent de sentiments religieux très modérés. C’est alors qu’ils firent volte-face, et soudainement, avec un remarquable ensemble, prirent la tête du mouvement réformiste dont ils étaient, hier encore, les adversaires les plus violents. « Nous serions aveugles de méconnaître que c’est grâce à la science européenne que le Japon a vaincu la Russie, s’écrièrent en pleine mosquée des prédicateurs. C’est grâce à cette science aussi, et seulement grâce à elle, que nous pourrons un jour défendre notre nationalité et notre indépendance. Mettons-nous donc au travail ! » Et ils se mirent à l’œuvre pour montrer aux populations qu’ils étaient réellement plus progressifs que les « frangis » : livres, pamphlets, affiches, furent soudain répandus dans toutes les grandes villes, surtout à Téhéran, où plusieurs complots furent publiquement tramés. Après quoi, réclamant un bouleversement général, les mollahs éconduits firent grève et quittèrent la Perse en pèlerinage vers Kerbelah, la ville sainte et l’Iman Hossein, située aux environs de Bagdad, en territoire turc.

Leur manœuvre a pleinement réussi. Ils ont regagné leur influence et, sous prétexte de progrès, entraîné le Chah à promulguer un semblant de Constitution. Les conseillers européens vont déménager et leur céder la place. Mais après ? Après, nous doutons fort que la Perse y trouve bénéfice.

P. S. — La décision pontificale.

Le Pape a repoussé les associations cultuelles. Nous n’en sommes pas surpris. Depuis son avènement Pie x s’est montré avant-tout pontife romain, catholique strictement orthodoxe. Il ne pouvait pas accepter de se soumettre à une loi qui — les théolo-