considérables. L’autre exemple nous est offert par l’ancien Pérou, où, avant l’époque des Incas, des sociétés à demi civilisées se sont constituées dans des vallées séparées les unes des autres « sur la côte par des déserts torrides et à peu près infranchissables, et plus avant dans les terres par des montagnes élevées ou par des puñas froides et impraticables. » Squier reconnaît un facteur de leur civilisation dans l’impossibilité où ces peuples se trouvaient, par suite de ces conditions, d’échapper à la contrainte gouvernementale ; et un ancien écrivain espagnol, Cieza, y voit la cause des différences sociales qui séparaient les Péruviens de leurs voisins les Indiens du Popoyan, qui pouvaient battre en retraite « vers d’autres régions fertiles, chaque fois qu’ils étaient attaqués ». Par contre, on voit assez aisément comment la facilité des communications au dedans favorise, dans la région occupée, l’accroissement de la densité de la population. Une remarque de Grant sur les peuplades de l’Afrique équatoriale fait sentir l’importance de cette cause. « Nulle juridiction, dit-il, ne s’étend sur un district dont la longueur exige plus de trois ou quatre jours de marche. » De tels faits, donnant à penser que l’intégration politique peut progresser à mesure que les moyens d’aller d’un lieu à un autre s’améliorent, nous remettent en mémoire que, depuis le temps des Romains jusqu’à nos jours, la construction de routes a rendu possible la formation de plus grands agrégats sociaux.
Nous avons donné ailleurs des preuves qu’un certain type de constitution physique est une condition nécessaire de l’agrégation[1]. Nous avons vu que les races trouvées capables de former de grandes sociétés avaient été préalablement soumises, durant de longues époques, à des conditions physiques favorables à la formation d’une constitution vigoureuse. Nous ajouterons seulement que l’énergie constitutionnelle requise par l’accomplissement d’un travail continu sans lequel il ne saurait y avoir ni civilisation ni condensation de population, phénomène concomitant de la civilisation, ne s’acquiert pas rapidement dans toutes les circonstances ni sous toute discipline ; elle est le résultat uniquement de modifications héréditaires, lentement accumulées. Les effets du gouvernement des Jésuites sur les Indiens du Paraguay offrent une preuve excellente de l’incapacité physique des races inférieures pour un travail continu. Les Jésuites avaient pliés ces Indiens à des habitudes industrielles et à une vie réglée que beaucoup d’auteurs jugeaient admirables, mais cette nouvelle existence eut pour résul-
- ↑ Principes de sociologie, § 16.
