Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/291

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premier ne pourrait pas plus que le second prendre ce prétexte pour élever le prix de sa denrée. Ce n’est point la baisse absolue des profits, c’est leur baisse relative qui détourne les capitaux d’un commerce quelconque ; c’est la différence entre les profits qui attire le capital d’un emploi vers un autre.

Il faut cependant convenir que dans l’état actuel de la taxe des pauvres en Angleterre, une plus grande partie de cette contribution tombe sur le fermier que sur le manufacturier, eu égard aux profits respectifs de chacun, le fermier étant imposé d’après les productions qu’il retire de la terre, et le manufacturier ne l’étant que d’après la valeur des bâtiments dans lesquels il travaille, sans aucun égard à la valeur des machines, du travail industriel, ni du capital qu’il peut employer. Il s’ensuit que le fermier peut élever le prix de ses produits de la totalité de cette différence ; car, puisque l’impôt est inégal dans sa répartition, et qu’il atteint surtout ses profits, le fermier aurait moins d’avantage à consacrer son capital à l’agriculture, qu’à l’employer dans un autre commerce, si les produits de la terre ne montaient pas de prix. Si, au contraire, l’impôt eût pesé avec plus de force sur le manufacturier que sur le fermier, le premier aurait pu élever le prix de ses marchandises de tout le montant de la différence, par la raison même qui, en de pareilles circonstances, aurait déterminé le fermier à élever le prix des produits de la terre. Dans un pays dont l’agriculture acquiert tous les jours une nouvelle extension, si les impôts pour les pauvres pèsent particulièrement sur l’agriculture, ils seront payés, partie par ceux qui emploient les capitaux et qui en retireront moins de profits, et partie par le consommateur des produits de la terre, qui les paiera plus cher. Dans un tel état de choses, l’impôt peut, dans certaines circonstances, devenir même avantageux aux propriétaires, au lieu de leur être nuisible ; car, si l’impôt payé par les cultivateurs des terres de la plus mauvaise qualité, est plus fort, relativement à la quantité du produit obtenu, que l’impôt payé par les fermiers des terres les plus fertiles, la hausse dans le prix du blé, qui doit s’étendre à tous les blés, fera plus qu’indemniser ces derniers fermiers du montant de l’impôt. Ils conserveront cet avantage pendant tout le temps que dureront leurs baux ; mais, à leur expiration, il passera aux propriétaires.

Voilà quel serait l’effet de la taxe des pauvres dans un état de prospérité croissante de la société ; mais dans un état stationnaire ou rétrograde, s’il était impossible de retirer les capitaux employés à la culture des terres, dans le cas où l’on augmenterait le taux de l’impôt, la partie qui tomberait sur l’agriculture serait payée, pen-