Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/757

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richir le gouvernement des bénéfices que la Banque prélevait à titre d’intérêts sur le montant de ses émissions.

Il existe pourtant une autre objection vers laquelle je sollicite l’attention du lecteur.

On a dit qu’il serait dangereux de confier au gouvernement le pouvoir d’émettre de la monnaie de papier, qu’il en abuserait certainement ; que dans le cas où il faudrait faire face aux exigences inflexibles d’une guerre, il cesserait de payer ses billets au porteur en espèces, et que dès ce moment la circulation prendrait le caractère d’un papier-monnaie national. J’avoue que nous aurions fortement à redouter de pareils dangers, si le gouvernement, c’est-à-dire les ministres, devait être personnellement investi du droit d’émettre le papier. Mais je propose de déposer ce droit entre les mains de commissaires que le vote de l’une ou des deux Chambres du Parlement pourrait révoquer. Afin de prévenir toute intelligence entre les commissaires et les ministres, je propose aussi de proscrire toute espèce de relations trésoraires entre eux. Les commissaires, complètement affranchis de tout contrôle ou de toute influence gouvernementale, ne devraient, sous aucun prétexte, prêter des fonds à l’État. Les ministres n’auraient dès lors sur des fonctionnaires aussi indépendants de leur autorité, qu’un pouvoir bien inférieur à celui qu’ils possèdent actuellement sur les directeurs de la Banque. L’expérience nous a appris combien peu ces derniers ont su résister au magnétisme ministériel, et combien de fois ils ont consenti à multiplier les avances sur les bons de l’Échiquier, au moment même où ils déclaraient hautement qu’elles devaient porter atteinte à la solidité de leur établissement et à l’intérêt général. Si l’on dépouille la correspondance du gouvernement avec la Banque antérieurement à la suspension des paiements en 1797, on y lit que la Banque attribuait (faussement, selon moi, dans cette circonstance) la nécessité de cette mesure aux demandes réitérées et urgentes que le gouvernement lui adressait dans le but d’obtenir une augmentation d’avances. Je demande alors si le pays ne trouverait pas dans la substitution du plan que je propose au système des émissions actuelles de la Banque, s’il ne trouverait pas, dis-je, dans l’institution de commissaires inamovibles destinés à créer la monnaie de papier du pays, de puissantes garanties contre toutes les influences de nature à agir sur l’esprit de ceux qui émettent le papier, et à les faire dévier de la ligne du devoir. Si le gouvernement avait besoin d’argent, il serait obligé de l’acquérir par les voies légitimes, soit en levant des taxes, en émettant et