Page:Richard - Acadie, reconstitution d'un chapitre perdu de l'histoire d'Amérique, Tome 3, 1916.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

compte de leur situation tout-à-fait exceptionnelle. Les cent soixante-quinze familles qui s’implantèrent sur ce coin de terre d’Amérique et qui devinrent la souche de la nation acadienne, vivaient dans un isolement à peu près complet sous la domination française tout autant que sous le régime britannique ; elles étaient sans contact, sans relations avec les centres. Dans ces conditions, elles ne sentaient guère le besoin de s’instruire, ou, si elles en avaient le désir, les circonstances dans lesquelles elles se trouvaient les empêchaient de le satisfaire, et leurs aspirations en ce sens durent s’émousser vite devant les obstacles qui s’opposaient à ce que l’instruction pût fleurir parmi elles. Leur ignorance n’a donc pas de quoi nous surprendre. Mais, eût-elle été sans excuse et aussi profonde que Parkman le donne à entendre si souvent, il n’y aurait pas là de raison d’accabler ces gens, et de leur refuser la sympathie que mérite le malheur immérité[1].

L’acharnement que met Parkman à revenir sur ce point, l’insistance avec laquelle il mêle cette considération au récit de leurs infortunes, semble à tout le moins déplacée : leur ignorance et leur simplicité suffiraient-elles à excuser ou à atténuer le forfait dont ils furent les victimes ! Comme question de fait cependant, nous voyons, par leurs requêtes, que le quart et quelquefois le tiers d’entre eux ont signé leur nom de leur propre main : ce qui ne paraît pas indiquer une ignorance aussi complète que l’historien américain veut le faire croire.

  1. Le paragraphe qui suit est sur un demi-feuillet non-paginé, ajouté au fol. 714 du MS. original.