Page:Richardson - Clarisse Harlove, I.djvu/262

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Betty s’est chargée de ma lettre sans me dire un seul mot. Heureusement mon oncle n’était pas parti. Il attend à présent ma réponse à une nouvelle proposition que vous allez lire dans la sienne : " votre départ était absolument fixé à jeudi prochain. Cependant votre mère, secondée par M Solmes, a plaidé si fortement pour vous, qu’on accorde le délai que vous demandez ; mais sous une condition. Il dépendra de vous de le faire durer plus ou moins de quinze jours. Si vous refusez cette condition, votre mère déclare que jamais elle n’intercédera pour vous ; et vous ne méritez pas même la faveur qu’on vous offre, lorsque vos espérances, dites-vous, portent moins sur votre changement que sur le nôtre. " cette condition se réduit à souffrir pendant une heure la visite de M Solmes, qui vous sera présenté par votre frère ou votre sœur, ou votre oncle Antonin : on vous laisse le choix. " si vous résistez, comptez que, prête ou non, vous partirez jeudi pour une maison qui vous est devenue depuis peu étrangement odieuse. Répondez-moi directement sur ce point. Les subterfuges ne sont plus de saison. Nommez votre jour et votre heure. M Solmes ne vous mangera point. Voyons s’il y a du moins quelque chose en quoi vous soyez disposée à nous obliger. " Jules Harlove. Après quelques momens de délibération, je me suis déterminée à les satisfaire. Toute ma crainte est que M Lovelace n’en soit informé par son correspondant, et que ses propres alarmes ne le précipitent dans quelque résolution désespérée ; d’autant plus qu’ayant à présent quelques jours devant moi, je pense à lui écrire, pour suspendre une entrevue dont je m’imagine qu’il se croit sûr. Voici la réponse que j’ai faite à mon oncle : monsieur, quoique je ne pénètre pas quel peut être le but de la condition qu’on m’impose, j’y souscris. Que ne puis-je m’aveugler de même sur tout ce qu’on exige de moi ! Si je dois nommer quelqu’un pour accompagner M Solmes, et que ce ne puisse être ma mère, dont la présence serait ce que j’ai de plus heureux à souhaiter, que ce soit mon oncle, s’il a la bonté d’y consentir. Si je dois nommer le jour (on ne me permettrait pas sans doute de le renvoyer trop loin), que ce soit mardi prochain : le tems, quatre heures après midi : le lieu, ou le grand cabinet de treillage, ou le petit parloir, qu’il m’était permis autrefois de nommer le mien. Cependant, monsieur, accordez-moi votre protection auprès de ma mère, pour l’engager dans cette occasion à m’honorer de sa présence. Je suis, monsieur, etc. Clarisse Harlove. On m’apporte à ce moment la réponse. Lisons… j’avais cru qu’il convenait à mon aversion de nommer un jour éloigné ; mais je ne m’étais pas attendue qu’il fût accepté. Voilà donc une semaine gagnée ! Lisez, ma chère, à votre tour. " je vous félicite de votre soumission. Nous sommes portés à juger favorablement des plus légères marques de votre obéissance. Cependant il semble que vous ayez regardé le jour comme un jour sinistre, puisque vous l’avez remis si loin. On ne laisse pas d’y consentir. Il n’y a point de temps à