Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 4, 1763.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
du Chev. Grandisson.

dire : tant de choses, que je ne sais par laquelle je dois commencer. Il vaut mieux me condamner au silence. D’ailleurs, je ne suis pas sûre de faire partir cette Lettre, ni de vous en écrire jamais d’autre.

J’ai déja passé dix jours dans cette grande Ville ; qui me paroît une Ville fort laide ; très-peuplée assurément, & le peuple fort actif. J’avois cru que tous les Habitans de votre Londres étoient riches… Mais de quoi vous entretiens-je ici ?… je ne suis sortie qu’une fois, & cela pour prendre l’air dans un de vos Parcs. Je ne saurois dire que l’Angleterre me plaise, ni ses Habitans : mais je n’ai encore vu personne.

Je mene une vie fort mélancolique : mais c’est celle qui me convient le mieux.

On me dit que vos Églises sont pauvres & nues. Vous faites plus pour vous-mêmes, que pour votre Dieu. Mais, dans cette simplicité de vos lieux de dévotion, peut-être avez-vous plus d’égard au cœur qu’à l’œil… Mais que veut dire tout ce que j’écris ? Je sens que je suis fort sujette à m’écarter.

La vérité est que je ne suis pas en bonne santé. Ma tête a besoin d’excuses.

Mais ne me direz-vous pas comment il est arrivé, qu’ayant le meilleur des Peres, la meilleure des meres, les Freres les plus affectionnés, je puisse les regarder comme autant de Persécuteurs ? Comment moi, qui les aime, qui les honore autant qu’une Fille & une Sœur l’ait jamais fait, j’ai pu les quitter, pour venir dans une Terre étrangere,