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Histoire

remarquois de la diminution dans l’amitié de ses deux Sœurs. Qui peut vous connoître toutes deux, & se contenter d’être aimé de vous à demi ?

J’ai reçu de la Comtesse de D… une longue Lettre, où sa générosité n’éclate pas moins que son amitié. Elle me félicite sur sa conversation avec votre Frere, & le détail qu’elle m’en fait est extrêmement flatteur pour ma vanité. Je serai heureuse, ma chere, si vous continuez de m’aimer, & si j’apprends que Clémentine n’est pas malheureuse. J’allois dire que cette derniere certitude est nécessaire à ma tranquillité, car votre Frere peut-il se promettre quelque bonheur, s’il voit manquer quelque chose à celui d’une Femme dont la maladie a tenu son cœur en suspens, dans le tems même qu’il n’avoit aucune vue sur elle ?

Je plainds du fond du cœur Mylady Anne S… Quel sort, d’aimer sans espérance ! d’aimer un objet que tout le monde en reconnoît digne, & dont on n’entend retentir que les louanges ! Combien de femmes verront échouer leurs premieres amours, par la préférence de votre Frere pour une seule, quelle, ma chere, qu’elle puisse être ! Cependant, sur un mille, qu’il y en a peu qui obtiennent l’homme de leur choix !

Mylady D… pousse la bonté, dans sa Lettre, jusqu’à me demander la continuation de notre correspondance. Je serois bien