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c’est de modifier notre droit de propriété de façon à permettre à l’État de très grands prélèvements sur les héritages. Le collectivisme affecte de négliger ce moyen, notre constitution légale de la propriété, et toutes les institutions humaines en général lui paraissant essentiellement impuissantes à déterminer les phénomènes économiques. Mais cette doctrine est fausse. Le nouveau droit de propriété pourrait être pacifiquement établi par les organes représentatifs le jour où prévaudraient enfin les mandataires de la classe prolétarienne. Leurs délibérations élimineraient complètement — sauf le cas d’une résistance extra—légale des capitalistes, aboutissant à des restrictions de votes et autres empêchements — la nécessité ou le danger d’une de ces révolutions violentes que bien des gens prévoient et annoncent pour la fin du régime actuel.

Le prélèvement sur les héritages, progressif dans le temps, serait principalement caractérisé :

1o Par des effets bienfaisants immédiats, puisque, le lendemain même de son institution, la moyenne habituelle des décès mettrait aux mains de l’État une bonne partie des successions ouvertes[1]

  1. Selon M. de Foville, la mort fait passer annuellement sous les fourches caudines du fisc la 33e partie environ de la totalité des patrimoines actuels (De Foville, La fortune de la France, « Annuaire de la Soc. de statist. de Paris », nov. 1883. page 411).

    L’ensemble de l’actif successoral soumis aux droits sur les héritages (the total amount of capital paying death duties) a été, en 1895-1896, de 6,6 milliards en chiffres