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Page:Rilke - Histoires du Bon Dieu.pdf/45

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électriques n’y contribuaient pas peu), il décida de confiner ses regards pour quelque temps à une haute maison de rapport, parce que ce serait beaucoup moins fatigant. En même temps il se souvint de son ancien désir de voir une fois un homme vivant, et dans ce but ses regards plongèrent, en remontant peu à peu, dans les fenêtres des divers étages. Les gens du premier (c’était un riche commerçant avec sa famille), n’étaient pour ainsi dire que vêtements. Non seulement toutes les parties de leur corps étaient couvertes d’étoffes précieuses, mais les contours extérieurs même de ces habits montraient en beaucoup d’endroits une telle forme qu’aucun corps ne pouvait se dissimuler dessous. Au deuxième étage il n’en allait guère mieux. Les gens du troisième étaient sans doute beaucoup moins couverts, mais ils étaient si sales que le bon Dieu ne distinguait que des sillons gris et que dans sa bonté il était déjà tout prêt à leur ordonner de produire des fruits. Enfin, sous le toit, dans une petite chambre mansardée, le bon Dieu trouva un homme, vêtu d’un méchant habit, qui était occupé à pétrir de la glaise.