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Page:Rilke - Histoires du Bon Dieu.pdf/46

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« Oho, d’où tiens-tu cela ? » l’interpella-t-il. L’homme ne retira même pas sa pipe des dents, et grommela : « Le diable sait d’où. J’aimerais bien mieux n’être qu’un cordonnier. On est assis là, toute la sainte journée, et l’on s’échine. » Et le bon Dieu eut beau poser d’autres questions encore, l’homme était de mauvaise humeur et ne répondait plus. Jusqu’au jour où arriva pour lui une grande lettre du maire de cette ville. Alors, sans que le bon Dieu l’eût même interrogé, il se mit à tout lui raconter. Depuis si longtemps il n’avait plus reçu de commande. Maintenant, tout à coup, il devait faire une statue pour le parc municipal, et elle devait s’appeler : la Vérité. L’artiste travailla jour et nuit dans un atelier lointain, et en voyant cela, le bon Dieu retrouvait de vieux souvenirs. S’il n’en avait toujours encore voulu à ses mains, il aurait peut-être de nouveau entrepris quelque chose.

» Mais lorsque vint le jour où la statue qui s’appelait la Vérité, devait être portée à sa place, au jardin, où Dieu aussi eût pu la voir dans sa perfection, il y eut un gros scan-