Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/104

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Mais au moment même où elle commence à apparaître terminée, la piété s’en détourne ; et ils vont diminuant, les fidèles agenouillés dans cette œuvre.

Il serait tentant, quoique délicat, d’essayer de situer, vis-à-vis de la génération actuelle, la gloire de Victor Hugo. On ne peut nier un recul, un éloignement graduel, mais ceci est le résultat d’une loi presque physique. L’admiration a aussi ses reflux. D’ailleurs il y a satiété. Il lui faudra, comme lui-même le disait un jour avec un naïf orgueil, désencombrer le siècle. Même pour l’œuvre d’autrefois, on y retourne moins ; la plupart aiment mieux se souvenir de l’avoir lue.

Dans ce délaissement, il faut, à vrai dire, faire la part de la mode. La mode existe en matière d’art comme en toutes matières, aussi changeante et sans fondement. On s’engoue ici ; on se déprend là. L’œil se déshabitue vite. Et tout ce qui n’est plus la mode apparaît aussitôt lourd ou laid.

Pourtant le changement vis-à-vis de Hugo n’est pas que de hasard et d’impression. On prétend en donner des raisons. Les esprits très affinés, très cérébraux, ont voulu contrôler ces