Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/171

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brandt ; en face, la salle à manger qui dut servir de réfectoire à la petite école du curé d’Arzanno ; au fond, un vaste escalier tournant, en chêne solide, mène à une suite de chambrettes, à l’étage — les anciens dortoirs où pour jamais les voix d’enfants sont mortes et aussi celle du vieux maître qui y répandait en eux son âme virgilienne.

À l’entrée du village, la même église est là, avec son clocher de pierre octogone, ses deux tourelles, sa balustrade ajourée et, par-dessus, le légendaire coq d’or. Voici la chapelle bariolée où Brizeux venait au catéchisme, entendait l’orgue avec ravissement et souriait à la petite amoureuse du Moustoir, comme si elle eut été la Vierge et la Madone, «  L’office se passait à nous bien regarder », comme il l’a écrit plus tard.

Autour de l’église, un lamentable cimetière de tombes abandonnées dont les calvaires et les croix naufragent dans les hautes, herbes. C’est ici même, sur les murs circulaires, il y a trois quarts de siècle, que Marie et Brizeux ont dû s’asseoir, les doigts tressés, si heureux dans leur naïf bonheur que la Mort elle-même ne les attristait pas ! Ô suavité d’une telle églogue ! Oh ! les amours de la quinzième année !

Voilà ce que Brizeux a dit dans tous ses poèmes, le charme des amours enfantines : le sien, d’abord, pour Marie ; puis, dans son second