Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/180

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tures du Louvre et des Tuileries, Notre-Dame en dentelle noire, les plans sévères du Palais de Justice, les tours lointaines pleines de masques, de gargouilles, de visages séculaires. Ici vraiment toutes les pierres parlent. Et elles parlent de l’ancienne France ; elles content des histoires du temps de saint Louis, des Valois, d’Henri IV et de Louis XIV. Ajoutez-y la Seine, ce cher ruisseau de la rue du Bac après lequel soupirait Madame de Staël, le fleuve de grâce souveraine qui apporte là toute la fraîcheur des campagnes, le reflet des arbres, des ciels, des plaines florissantes, et qui aère, ventile les monuments accumulés de Paris. Maintenant voici, tout autour, sur le quai Voltaire même, les antiquaires et les libraires.

Songez maintenant au talent de M. Anatole France. N’est-il pas le résumé de tout cela ? Il a la fierté indolente de la Seine ; il mêle Notre-Dame et le Louvre ; il est religieux et vieille France, passionnel et architectural, toujours composite ; il apparaît un assemblage de meubles rares, de tapisseries, de bijoux, de vieux portraits, de chasubles, de bibelots du culte. Il a bouquiné adroitement dans la grave librairie paternelle et dans les autres ; il a aussi bouquiné dans les boîtes d’en face où s’acquiert une érudition plus facile, dans de menus manuels, des brochures curieuses et parfois uniques.