Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/41

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sans cesse se trouva hanté par l’invention d’un « nouveau tour ». Et il n’est pas hardi d’affirmer que, dans la collaboration des Goncourt, Edmond aussi fut principalement le novateur, celui qui toujours se préoccupa de trouver, de créer. N’en avons-nous pas une preuve catégorique dans la préface qu’il signe seul en 1879, où il annonce le projet d’un roman qui se passerait dans le grand monde et qui aborderait enfin « la réalité élégante » ? Là est le succès pour les jeunes, déclare-t-il, et non plus dans le canaille littéraire. N’est-ce pas une nouvelle voie ouverte, celle du roman mondain, qu’il inaugure lui-même ensuite, avec Chérie, et où devaient entrer, à son signe, M. Paul Bourget et ses continuateurs.

Cette préoccupation d’un « nouveau tour », d’un genre inédit, que Edmond de Goncourt réalisait ainsi par son dernier livre, les deux frères l’avaient eue dès le début et dès les premières œuvres qu’ils signèrent ensemble.

Ils furent des inventeurs, et dans des domaines multiples. Nous ne parlons même pas de leur résurrection du XVIIIe siècle ; ni de leur goût d’art, subtil et sûr, qui introduisit le japonisme en France. Nous parlons surtout du roman dont ils apportèrent une formule neuve et où ils infusèrent un élément nouveau : le Moderne. Déjà dans Manette Salomon, qui paraît en 1867, Chassagnol