Page:Rodenbach - Le Carillonneur, Charpentier, 1897.djvu/311

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s’offrirent. Il vécut dans un tourbillon de bouches et de seins. Son visage se pencha pour mieux voir, approcha du bronze qui, glacé, lui donna la sensation d’une brûlure, comme s’il avait baisé des chairs en feu. Il connut tous les péchés.

Dans ce temps-là, quand il redescendit de la tour, il lui arriva d’errer longtemps par la ville, tard. Un désir de chair l’énervait ; les scènes obscènes de la cloche l’accompagnaient, se réalisaient en images grandies et vivantes. Il s’attarda à des flâneries dans des ruelles équivoques, vers les faubourgs. Il guetta une rencontre inopinée, une fenêtre éclairée, que quelque femme, en mal d’amour, ouvrirait peut-être, tout ce qu’on fait à vingt ans, dans le premier tourment de la sève ! Il suivit des mantes, espéra des étreintes anonymes, la minute des sens, qui contient tout l’oubli…