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VII


Joris Borluut commençait à ne plus voir clair en lui-même. Chaque fois qu’il s’en revenait de la tour, un trouble persistait en lui, durant de longs moments, un désarroi de toutes ses idées, une éclipse de sa volonté. Il se cherchait. Il se sentait à la dérive. Sa tête charriait des nuages. Le carillon survivait, l’accompagnait de sa pluie sonore qui pâlissait tous les autres bruits de la vie… C’est surtout dans les affaires de son cœur que la confusion s’augmentait. Depuis un assez long temps déjà, Borluut s’était aperçu qu’il n’allait pas assidûment, le lundi soir, chez le vieil antiquaire pour l’unique agrément de voir Van Hulle lui-même et Bartholomeus et Farazyn et les autres partisans de la Cause flamande, et pour s’exalter avec eux à de grands espoirs civiques. Il n’y avait pas, dans ce plaisir, que l’amour de la ville. Un autre amour s’insinua… Les deux filles de Van Hulle assistaient à ces soirées, différentes, mais séduisantes l’une et l’autre. De leur