Page:Rodenbach - Le Règne du silence, 1901.djvu/95

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Semaient, dans l’eau, des lis et de blancs azalées
Pour l’élévation de la lune agrandie.
Toute l’ombre semblait en marche vers l’hostie :
Les murailles étaient des robes étalées
De béguines au but de leur pèlerinage,
À genoux, eût-on dit, dans l’eau froide, et priantes ;
Et d’autres pèlerins dans le pâle sillage
De ces blancheurs de plus en plus irradiantes,
Les pèlerins du rêve, adoraient en silence
Le lac d’amour dans sa candide rutilence,
Reposoir de la lune avec les blanches toiles
Du brouillard, comme des nappes de sainte table,
Où les doigts sont lavés de leur passé coupable
En égrenant dans l’eau des chapelets d’étoiles ;
Et voilà tout à coup, sous des pardons insignes
Que, leurs âmes étant absoutes une à une,
Les nocturnes songeurs allaient avec les cygnes
Communier sous les espèces de la lune !