Page:Rodenbach - Le Règne du silence, 1901.djvu/99

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Vieilles maisons, en deuil pour quelque anniversaire,
Et qui, tristes, avec leurs souvenirs divers,
N’accueillent plus qu’un peu de pauvres et de prêtres.
Ce pendant qu’autrefois, avant les durs hivers,
La jeunesse et l’amour riaient dans leurs fenêtres
Claires comme des yeux qui n’ont pas vu mourir !
Mais, depuis lors, ces yeux des pensives demeures
Dans leurs vitres d’eau frêle ont senti dépérir
Tant de visages frais, tant de guirlandes d’heures
Qu’ils en ont maintenant la froideur de la mort !
(or mes yeux sont aussi les vitres condamnées
D’une maison en deuil du départ des années)
Et c’est pourquoi, du fond de ces lointains du nord,
Je me sens regardé par ces yeux sans envie
Qui ne se tournent plus du côté de la vie
Mais sont orientés du côté du tombeau…
Yeux des vieilles maisons dont mes yeux sont les frères,
Lassés depuis longtemps des bonheurs temporaires,
Yeux plus touchants près de mourir ! Regard plus beau