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LE PALAIS-ROYAL

— Quel dommage, Saint-Georges, que votre violon ne soutienne pas le chant d’Alsevédo !

Saint-Georges ne répondit que par une légère inclination de tête, qui fit voler une partie de sa poudre dans les yeux de M. Nollot. En sa qualité de professeur de harpe, M. Nollot abominait le violon.

— Voyez donc, mesdames ! voilà M. de Lauraguais avec M. de Guines ! dit M. Nollot en les montrant tous deux sous la fenêtre à Mme de Montesson, qui se pencha vers Mme de Blot avec un mouvement marqué de dépit ; nouvelle maladresse du pauvre Nollot : il oubliait que M. le comte de Guines avait été fort avant dans les bonnes grâces de Mme de Montesson et que depuis son mariage avec le duc d’Orléans, on évitait de prononcer son nom devant elle. M. de Valence, qui se trouvait dans le même cas, comprit fort bien, et pour réparer la sottise de M. Nollot :

— Parbleu ! M. de Lauraguais, dit-il, passe bien fièrement, mesdames ! Ne dirait-on pas qu’il a gagné ce matin ; et pourtant, vous le savez, il a perdu contre M. le comte d’Artois !

— Et moi, j’ai gagné ! dit avec une impudence rayonnante M. de Vannes à Saint-Georges, en lui frappant sur l’épaule familièrement. Mon ami, mon cher ami, c’est à vous que je dois cela !

M. de Vannes était aussi splendidement vêtu qu’il avait paru râpé le matin même à Saint-Georges. La vie de certains joueurs est faite ainsi, un composé de misère et d’éclat. En sa qualité de lieutenant de dragons et de cadet noble de Saint-Malo, il était toléré