Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sortent de mes mains, battus comme celui-ci ; les fous, confus ; les gens discrets, effrayés ; les dévots, émus ; les chastes, embrasés. Or, cousine, apprends que c’est là un tout autre art que celui de Célestine ; elle me croyait sotte parce que je voulais bien l’être. Et maintenant que de ce côté, nous en savons autant que nous voulons, allons chez cette face de pendu qui sortit de chez moi en ta présence, jeudi, de si mauvaise humeur. Fais comme si tu voulais nous réconcilier et comme si tu m’avais priée de le revoir.




ACTE DIX-HUITIÈME


Argument : Élicie, sur le conseil d’Areusa, s’occupe de réconcilier sa cousine et Centurion. Elles vont ensemble chez Centurion et le prient de venger les morts sur Calixte et Mélibée ; il s’y engage en leur présence. Et comme il est naturel à de pareils hommes de ne pas faire ce qu’ils promettent, il s’en dispense, comme on le verra par la suite.


ÉLICIE, CENTURION, AREUSA.

Élicie. Y a-t-il quelqu’un ici ?

Centurion. Garçon, cours, tu verras qui ose entrer sans frapper à la porte. Reviens, j’ai vu qui c’est. Ne vous couvrez pas avec votre manteau, madame, vous pouvez bien ne pas vous cacher ; quand j’ai vu entrer Élicie, j’ai pensé qu’elle ne pouvait amener avec elle mauvaise compagnie ; sa présence m’annonce une nouvelle plutôt agréable que pénible.

Areusa. N’entrons pas ici. Sur ma vie, le coquin fait déjà le fier ; il s’imagine que je viens le prier ; il sera plus heureux avec des femmes effrontées comme lui qu’avec nous. Retournons, au nom de Dieu ! je meurs d’effroi de voir une figure aussi laide. Crois-tu, sœur, que tu me fasses faire d’agréables stations et