Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/257

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manière qu’elles pensent toutefois que j’ai mis zèle et diligence à exécuter leurs ordres ; il y aurait danger pour moi si elles venaient à m’accuser de négligence. Je vais faire le malade, mais à quoi bon ? Elles ne renonceront pas à leur projet quand je serai guéri. Si je dis que j’y suis allé et que je les ai fait fuir, elles me demanderont des preuves, qui ils étaient, combien ils étaient et je ne saurai pas répondre ; je suis perdu… Or donc quel parti prendrai-je pour m’acquitter envers elles en toute sécurité ? Je vais faire appeler Traso le boiteux et ses compagnons, je leur dirai que, comme je suis occupé cette nuit à une autre affaire, il faut qu’ils aillent faire un carillon de boucliers en manière d’attaque pour effaroucher quelques jeunes gens ; qu’on me l’a recommandé ; que ce n’est qu’une promenade de laquelle il ne résultera aucun mal, et qu’il n’y aura qu’à les faire fuir et à retourner dormir.




ACTE DIX-NEUVIÈME


Argument : Calixte se rend avec Sosie et Tristan au verger de Plebère pour visiter Mélibée, qui l’attend avec Lucrèce. Durant le trajet, Sosie raconte à Tristan ce qui lui est arrivé avec Areusa. Pendant que Calixte est dans le verger avec Mélibée, viennent Traso et d’autres envoyés par Centurion pour remplir la promesse faite à Élicie et Areusa. Sosie va à leur rencontre. Calixte, entendant du verger le bruit qu’ils font dans la rue, veut sortir ; cette sortie est cause de la fin de ses jours. (Puissent ses semblables recevoir pareille récompense, et les amants apprendre par cet exemple à ne pas aimer !)


SOSIE, TRISTAN, CALIXTE, MÉLIBÉE, LUCRÈCE.

Sosie. Allons doucement, afin qu’on ne nous entende pas. D’ici au verger de Plebère, je te conterai,