Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/430

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ce que cette nouvelle traduction de Stace était estimée[1]. On dit toujours, chez M. Le Roi, force bavardises ; en général, on s’occupe beaucoup de Mesmer dans ce moment, et presque tous les médecins, qui d’ailleurs le traitent de charlatan, se livrent à des théories nouvelles sur les atmosphères des différents corps. Ils m’ont l’air de courir, sous un voile étranger, après les idées de Mesmer, afin d’avoir droit de dire, lorsque celui-ci publiera tout : « Mais on savait tout cela ! » Cette doctrine des atmosphères est fort plaisante, du moins elle prête à des explications heureuses et burlesques. Nous allons tous à Vincennes demain. Tu as donc été un jour sans m’écrire ! Je n’ai rien eu dimanche. Je t’expédierai maintenant par l’ami, excepté la présente, à cause de notre voyage. Tu vois que tu auras bientôt le cher frère[2], que je serai privée d’embrasser ; dis-lui pour moi tout ce que tu sais et embrasse-le à mon intention. Si cette petite morveuse savait me remplacer, comme elle vous dirait de choses à tous deux, comme elle prendrait vos mains en les réunissant, comme elle vous caresserait !

Je suis bien en peine de savoir précisément si tu as toujours ces démangeaisons, et, dans le cas de l’affirmative, je voudrais bien que tu ne négligeasses pas le cataplasme ; je suis tourmentée de cela et je désirerais que tu le fisses, du moins pour ma tranquillité. Le bon Flesselles reviendra, je crois, après ces fêtes. Le ciel lui fasse voir la fin de son affaire et de la nôtre ! Adieu, mon bon ami ; le frère te dit mille et mille choses. Je t’embrasse de tout mon cœur avec notre Eudora.

Souvenirs empressés et affectueux a M. d’Hervillez et à la société. Acquitte-moi auprès des voisins.


Lettre du prieur de Crespy :

J’ai reçu, mon cher frère, des nouvelles de ma sœur, de Paris ; mais, comme elle ne me donnait point d’adresse, je n’ai pas pu lui faire de réponse, ce dont j’ai été bien fâché. Faites-lui bien mes excuses, car je ne veux point me brouiller avec le beau sexe, encore moins avec elle. Suivant sa lettre, elle doit vous avoir rejoint ; je souhaite qu’elle l’ait fait en bonne

  1. Probablement la traduction de Cormiliolle, 1783-1802.
  2. Le prieur de Crespy.