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toyable qui émétiserait le diable et qui pourrait tuer mon enfant. Je ne sais à quoi me résoudre et je me ronge de soucis. Voilà ce qui m’occupe et m’attriste maintenant par-dessus tout. Oh ! combien l’on paye les douceurs de la maternité !

Est-il vrai que le prince Louis[1] ait été arrêté au milieu de la galerie, à Versailles ? Cette manière a quelque chose d’étrange ; mandez-nous le pourquoi, le mode et le lieu où on le dit renfermé.

Voilà un chien de papier, je ne me servirai plus jamais de son pareil.


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[À BOSC, À PARIS[2].]
27 août [1785, — de Villefranche].

Le courrier ne part qu’après-demain, mais j’ai quelques moments de loisir, et je veux me dépêcher de vous dire que vous n’avez pas le mérite de m’avoir le premier nommé La Blancherie. J’avais appris qu’il était à Lyon, et de ce moment je ne fis aucun doute que ce fût lui dont vous aviez voulu me parler[3]. Je suis pourtant bien aise de savoir que vous ne lui aviez pas annoncé Mademoiselle Phlipon, sa négligence me paraît plus excusable. Je suis modeste, moi ! Mais ce que je vous apprendrai, c’est que La Blancherie étant allé voir à Lyon le directeur de l’Académie, M. de Villers, pour le prier de le conduire à une séance, M. de Villers lui demanda, d’un ton d’égard et d’honnêteté, s’il désirerait être associé à cette compagnie. « Non, dit La Blancherie, je ne dois être d’aucune. — Et pourquoi ? — Parce qu’il me faudrait être de toutes les Académies de l’Europe. » M. de Villers, homme grave, qui a du caractère et de l’énergie, se contenta de répondre : « Vous m’avez dit, Monsieur, que vous deviez dîner chez M. tel ; vous pourrez aussi le prier de vous conduire à l’Académie. » J’ai vu ici, à la séance de la nôtre[4], deux ou trois hommes de mérite qui sont de

  1. Le cardinal de Rohan, arrêté le 15 août 1785 pour l’affaire du collier.
  2. Bosc, IV, 98 ; Dauban, II, 539.
  3. Voir lettres des 8 et 19 août 1785.
  4. La séance publique annuelle de l’Académie de Villefranche se tenait, comme presque partout, le 25 août, jour de la Saint-Louis. C’est à la place de son frère le chanoine, indisposé, que Roland lut le discours dont il avait déjà donné lecture à L’Acadé-