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[À BOSC, À PARIS[1].]
15 mars 1786, — [de Villefranche].

J’avais de grands projets de vous écrire, puis cela s’est passé, je ne sais comment.

Voici toujours une ci-jointe pour le docteur. Donnez-nous donc de vos nouvelles ! Êtes-vous content ? Il me semble que vous me devez au moins deux réponses à des balivernes que je vous ai contées, il y a des siècles.

Mon pauvre pigeon est en voyage, et je crois qu’il a les ailes bien mouillées ; je suis de mauvaise humeur contre ce chien de temps, que nous valent sûrement les péchés de votre capitale. Habitant de cette Babylone, vous m’avez bien l’air de participer à sa corruption, tandis que je me régénère dans la province, ah ! c’est une bénédiction !

Dites-nous donc quelque chose du grand Cagliostro, qui nous a enchantés aussi avec son très bon mémoire[2].

Eudora commence à se dépraver passablement : elle combine quelques idées, elle devient un peu soumise, elle compte jusqu’à douze et lit même assez couramment.

Adieu ; on aime encore dans ce climat, et je vous embrasse de tout mon cœur.

  1. Collection Alfred Morrison, 1 fol.
  2. Probablement le mémoire où Cagliostro, mis à la Bastille dans l’affaire du collier, s’était justifié d’avoir participé au vol (Biographie Rabbe), plutôt que les « Mémoires authentiques pour servir à l’histoire du comte de Cagliostro », brochure du marquis de Luchet qui avait paru à la fin de 1785. (Voir Correspondance littéraire, novembre 1785, et Mémoires secrets, 28 décembre.)

    Roland écrivait déjà à Bosc, le 4 octobre 1785, à propos de Cagliostro : « Douze Lyonnais, qui devaient être initiés par lui dans le rite égyptien, pleurent sa détention. La désolation est dans le temple… »