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tion. Si tu savais combien avec lui j’ai savouré mon bonheur, combien j’ai marqué d’endroits pour que nous les relisions ensemble, comme il m’a profondément touchée, comme j’ai retrouvé dans ses tableaux, ses expressions, ses préceptes, cette âme, ce sentiment et ce goût qui font les délices de ma vie ! Je veux apprendre par cœur plusieurs de ses vers ; je veux pouvoir le relire avec la facilité que me donne ma propre langue, quand je n’aurai pas le doux loisir de le suivre dans la sienne. Mon bon ami, tu m’achèteras Thompson quand tu pourras me faire un grand cadeau.

M. Pezant, en me renvoyant les Observations de M. de Landine, me mande : « Ce petit ouvrage est ingénieusement vu, naturellement et agréablement écrit. » Il ajoute qu’il a suivi avec émotion Mme  de Tencin dans sa retraite, qu’il aime à la voir aux prises avec le tentateur, et que, malgré la peinture vraiment séduisante de l’ivresse de l’âme jouissant de son innocence et de ses sacrifices, il ne sait pas mauvais gré à l’héroïne d’avoir un peu laissé effleurer son innocence, et d’avoir donné des culottes[1].

Au soir. — Je reçois ton paquet, et je me réjouis bien un peu que c’est toi qui dois le suivre, M. de Laudine est bien aimable de mettre du prix à mon suffrage, et j’imagine qu’en homme de goût il a choisi une femme fort bonne à connaître. Ta lettre marseillaise est bien, mais très bien. Cela a donc passé doux comme de l’huile ?

Adieu, gros loup. Ton petit tousse moins. Ti bacio per tutto.


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À BOSC, [À PARIS[2].]
17 janvier 1787, — [de Villefranche].

Lisez ma lettre et n’en abusez pas ; vous pouvez, mon ami, plaisanter quand une femme gronde et que ce n’est pas à vous qu’elle

  1. Allusion à une anecdote bien connue sur Mme  de Tencin.
  2. L.a., 2 pages in-8o (collection Étienne Charavay). — Il y a, dans un coin de la