Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1073

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superbe dont je n’ai pas toujours pu jouir. Vous allez voir renaître les beaux jours en Angleterre, et ils vous procureront sans doute de grands plaisirs ; car l’hiver est bien sombre dans ce pays, et les campagnes y ont des grâces qui leur sont particulières. Si vous étendez vos courses jusqu’aux montagnes de l’Écosse, vous verrez tous les sites qui ont enflammé Thompson, et qu’il a si bien décrits, non en géographe, il est vrai, mais en peintre.

La guerre de l’Inde sera donc continuée, et la soif de l’or, toujours excitée par le commerce, va de nouveau faire verser le sang humain. C’est profondément calculer sur notre situation qui véritablement ne nous permet guère de nous mêler des querelles de personne sur un autre hémisphère. N’avez-vous pas cherché à connaître madame Macaulay ? Son esprit, ses talents, sa trempe républicaine me paraissent la rendre bien intéressante. J’ai demandé à Brissot qu’il me prêtât son histoire, et j’en ai commencé la lecture[1]. Si vous étiez dans des circonstances moins graves, je vous chercherais querelle sur l’ennui dont vous faites l’aveu ; je croîs que vous vous êtes trompé sur le mot ; les âmes ardentes n’éprouvent point d’ennui, c’est la maladie d’un tas de gens auxquels vous ne ressemblez point ; mats ce n’est pas le cas de chicaner sur les expressions.

Adieu ; nous vous aimons toujours, à Paris comme à Lyon.


de Lanthenas :

Je n’ajoute qu’un mot, mon cher ami, pour vous adresser la présente. C’est M. Bertrand[2], mon ancien associé, qui désire vous voir et faire quelques tournées avec vous, si les lieux où ses affaires l’appelleront excitaient votre curiosité. Il va voir son fils qui est à Birmingham. C’est un enfant de bonne espérance, auquel il a toutes les raisons possibles d’être attaché.

Ci-joint quelques pamphlets pour les noirs. — Il s’agit de les remettre à M. Phillips[3] pour la Société des Amis des Noirs. — Salut.

  1. Voir sur Mme Macaulay une note de la lettre du 1er novembre 1790.
  2. Mathieu Bertrand, négociant au Puy alors notable de la commune de cette ville, plus tard maire du Puy (décembre 1793-mars 1795). Lanthenas avait des fonds chez lui.
  3. James Phillips, libraire à Londres George Yard, Lombard Street, était un quaker qui avait publié en 1786 le premier essai anti-esclavagiste de Thomas Clarkson. Son nom figure sur la liste du premier comité des Amis des Noirs fondé le 22 mai 1787 et sa maison était le lieu où ils se réunissaient. Brissot y avait fréquenté. Lorsque Bancal se rendit en Angleterre, Brissot l’adresse chez Phillips (catalogue Morrison, lettre du 6 novembre 1790). La liaison sur-