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ANNÉE 1781.

me rendre ton absence pénible. Je ne vis réellement qu’à demi, et, sans l’espérance du bien que pourra te faire ce voyage, jointe à l’idée de sa nécessité, je soutiendrais impatiemment ma situation. J’ai reçu hier une lettre de Dieppe, à mon retour de la messe, trop tard pour y répondre par le même courrier ; je viens de le faire à M. Cousin, qui te fait une longue narrée sur ce qu’il doit faire ou ne pas faire ; je crois lui avoir écrit suivant tes intentions, en convenant qu’il pouvait mettre ses Observations sur la musique, sur Métastase, Chiari et Goldoni, en apostille à la lettre de Venise, comme d’un Vénitien amateur, afin de ne pas faire de suspension ni de couture dans ta lettre ; mais en le priant, sur toute chose, de mettre de la précision et ne rien insérer autre, prose ou vers, dans tout le reste de l’ouvrage[1]. J’écris au frère[2] par les bureaux[3] pour lui envoyer des affiches qu’il demande ; il désire aussi un volume de mathématiques, je ne sais trop ce que c’est, tu feras cette expédition à ton retour ; je lui mande tout ce que je sais de son ouvrage ; j’ajoute des recommandations de veiller sur le frère dont la prolixité m’effraye toujours et à qui j’ai tenu la bride courte autant qu’il m’a été possible. On voulait réponse subite, parce que l’impression va son train : j’ai dit pourtant que, si l’on pouvait envoyer les additions avant, ce serait encore mieux.

J’écris à M. Lanthenas, qui m’a envoyé des échantillons : il dit qu’il viendra nous voir dans le mois d’août.

M. d’E…[4] est venu hier avec sa femme qui m’a l’air de s’accrocher à lui dans l’absence del cicisbeo[5] ; aujourd’hui le mari m’a envoyé un joli bouquet.

  1. Voir, sur les libertés que prenait Michel Cousin avec le texte de l’ouvrage dont il dirigeait l’impression, l’Appendice D.
  2. Cousin-Despréaux
  3. Les bureaux des Intendants du commerce. – Voir l’Appendice F.
  4. M. Deu de Perthes (Madame Roland écrit presque toujours d’Eu). « directeur général des Fermes à Amiens, pour les gabelles, les traites, le tabac et les brigades » (Alm. de Picardie, 1781, p.42). Nous avons dit qu’il était le voisin des Roland, et fort lié avec eux. – M. et Mme d’Eu sont fréquemment désignés dans la Correspondance par « le voisin », – « la voisine », – « les voisins ».
  5. M. Devins des Ervilles (Madame Roland écrit habituellement de Vin) était