Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/394

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Notre excellent Flesselles n’a pu causer avec son homme ; il est demeuré hier cinq heures dans l’antichambre du conlrôleur général auquel il avait à remettre une lettre. Il a rendez-vous absolu pour aujourd’hui avec le secrétaire, et il a déjà fait çà et là des démarches pour mettre tout en train si les découvertes sont favorables. Mais si M. de Calonne ménage les Intendants, s’il est réglementaire, il ne faut plus penser qu’à faire un autre voyage de Versailles pour remercier Mme  d’Arbouville, et plier bagages pour m’en retourner, en attendant d’autres circonstances. Car il est impossible d’aller à notre but pour les Lettres, à moins que de déterminer M. de Calonne a agir sans consulter les Intendants, ce qui ne peut se faire qu’en lui disant tout franchement les choses, qu’il prendrait mal s’il est réglementaire ; partant pas perdus, et quelque chose de pis. Quant à la sollicitation des Lettres et du reste, nous ne pouvons présenter ce reste sans faire intervenir ces Intendants qui nous feront obtenir le moins qu’ils pourront. Ils seront toujours plus ardents à nuire qu’à obliger, et s’ils peuvent te tenir éloigné sans te servir, quelle apparence qu’ils emploient un moyen qui ne satisfait pas en tout point leur mauvaise volonté ? Mlle  de la Blz.[Belouze] me disait qu’ils n’entendent point à ces Lettres, et qu’en supposant, si on leur renvoyait les mémoires, qu’ils ne parlassent que favorablement de tes travaux et de ta personne, ils concluraient néanmoins à ne pas accorder les Lettres, parce que ce n’est pas le cas, disent-ils. Attendons ; nous prendrons gaiement notre parti ; ce serait bien le diable si, dans les agitations qui bouleversent ce pays de là-haut, la face des choses ne pouvait changer en notre faveur en quelque temps.

J’ai envoyé le frère chez Cellot[1] avec un billet ; je le prierai de repasser aujourd’hui, d’après ce que tu me mandes. Je fais des copies à force, que je remporterai peut-être ; mais, dans le cas contraire, il ne faudrait pas être pris au dépourvu. Je t’embrasse de tout mon cœur. Au nom de l’amitié, ne néglige pas de mettre des cataplasmes à la

  1. Cellot, rue des Grands-Augustins (Alm. de Paris de 1785, p. 121), un des imprimeurs de l’Encyclopédie méthodique.