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AU-DESSUS DE LA MÊLÉE

de l’Occident, c’est l’impérialisme prussien ; et j’ose dire que ses états de service sont largement écrits sur la route dévastée de Liège à Senlis, par Louvain, Malines et Reims. Pour l’Allemagne, « le monstre » Ungeheuer (comme dit le vieux Wundt) qui menace la civilisation, c’est la Russie ; et le grief le plus âpre que les Allemands expriment contre la France est de s’être faite l’alliée de l’empire des tsars. Que de lettres j’ai reçues, qui nous le reprochaient ! Je lisais hier encore, dans une revue de Munich, Das Forum, un appel de Wilhelm Herzog, me sommant de m’expliquer au sujet de la Russie. — Eh bien, parlons-en donc ! Rien ne me convient mieux. Car cela nous permettra de peser, une fois, le danger russe et le danger allemand et de montrer qui des deux nous semble le plus menaçant.

Des faits de la guerre présente entre Allemagne et Russie, je ne parlerai pas. Tout ce que nous en savons provient de sources allemandes ou russes également suspectes. Si l’on devait y croire, la férocité serait la même dans un camp et dans l’autre. Les Allemands à Kalisch sont dignes de donner la main aux cosaques de Grodtken et de Zorothowo. — C’est de l’esprit de la Russie et de l’esprit de l’Allemagne que je parlerai ici, car il est l’essentiel, et nous le connaissons mieux.

Mes amis allemands, (car ceux de vous qui furent mes amis le restent, malgré les som-