Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/187

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tait parti, il ne restait plus que l’âme). Tordu sur ma paillasse, je m’efforçais de lire. Les apophtegmes héroïques des Romains n’eurent aucun succès. Au diable ces hâbleurs ! « Chacun n’est né pour aller à Rome » Je hais le sot orgueil. Je veux avoir le droit de me plaindre, tout mon soûl, lorsque j’ai la colique… Oui, mais lorsqu’elle s’arrête, je veux rire, si je puis. Et j’ai ri… Vous ne me croirez pas ? Mais alors que j’étais tout dolent, comme noix en un boisseau, que me claquaient les dents, en ouvrant au hasard le livre de Facéties de ce bon monsieur Bouchet, j’en trouvai une si belle, croustillante et dorée… vingt bons Dieux ! que je suis parti d’un éclat de rire. Je me disais :

— C’est trop bête. Ne ris donc pas. Tu vas te faire du mal.

Ah ! bien, je n’arrêtais de rire que pour braire, de braire que pour rire. Et je brais, et je ris… La peste en riait aussi. Ah ! mon pauvre petit gars, j’ai-t-y brait, j’ai-t-y ri !

Quand vint le point du jour, j’étais bon à mettre en terre. Je ne tenais plus debout. En me traînant à genoux, je parvins à l’unique lucarne qui donnait sur la route. Au premier qui passa, j’appelai, d’une voix de pot cassé. Il n’eut pas besoin, pour comprendre, d’entendre. Il me vit, il se sauva, avec des signes de croix. Moins d’un quart d’heure après, j’avais l’honneur d’avoir deux gardes devant ma maison ; et défense me fut faite de franchir la porte d’icelle. Las ! je n’y songeais guère. Je priai qu’on