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Jean-Christophe

Justement, j’étais allée à Cologne pour deux jours ! Au retour… Zu spät ! (Trop tard !)… s’interrompit-elle, pour semoncer sa bonne, qui lui apportait le citron trop tard pour le prendre dans son thé.

Et elle ajouta sentencieusement, avec la solennité naturelle que les vraies âmes allemandes mettent à officier les actes familiers de l’existence quotidienne :

— Trop tard, comme si souvent dans la vie !

(On ne savait s’il s’agissait du citron, ou de l’histoire interrompue.)

Elle reprit :

— Au retour, j’ai trouvé un mot d’elle, me remerciant de tout ce que j’avais fait, et me disant qu’elle partait : elle retournait à Paris. Elle ne laissait pas d’adresse.

— Et elle n’a plus écrit ?

— Plus rien.

Christophe vit de nouveau disparaître dans la nuit la mélancolique figure, dont les yeux lui étaient réapparus, un moment, tels qu’il les avait vus, pour la dernière fois, le regardant à travers la glace du wagon.