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DANS LA MAISON

intérêt pouvait bien être son opinion sur l’artillerie française. L’autre lui montra, triomphant, des canons musicaux, des espèces de tours de force, des morceaux qu’on pouvait lire en commençant par la fin, ou bien à quatre mains, en jouant l’un la page à l’endroit, l’autre la page à l’envers. Ancien Polytechnicien, le commandant avait toujours eu le goût de la musique ; mais ce qu’il aimait surtout en elle, c’était le problème ; elle lui semblait — (ce qu’elle est en effet, pour une part) — un magnifique jeu de l’esprit ; et il s’ingéniait à poser et résoudre des énigmes de constructions musicales, plus extravagantes et plus inutiles les unes que les autres. Naturellement, il n’avait pas eu beaucoup de temps, au cours de sa carrière, pour cultiver sa manie ; mais depuis qu’il avait pris sa retraite, il s’y donnait avec passion ; il y dépensait toute l’énergie et l’ingéniosité qu’il avait mises naguère à poursuivre à travers les déserts de l’Afrique les bandes des rois nègres, ou à échapper à leurs traquenards. Christophe s’amusa de ces charades, et il en posa, à son tour, une autre plus compliquée. L’officier fut ravi ; ils joutèrent d’adresse : ce fut, de part et d’autre, une pluie de logogriphes musicaux. Après qu’ils eurent bien joué, Christophe remonta chez lui. Mais dès le matin suivant, il reçut de son voisin un problème nouveau, un véritable casse-tête, auquel le commandant avait travaillé, une partie de la nuit ; il y