Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 7.djvu/234

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Olivier avait raison. Ce n’est pas par les paroles qu’on agit sur les autres. C’est par son être. Il y a des gens qui rayonnent autour d’eux une atmosphère apaisante, par leurs regards, leurs gestes, le contact silencieux de leur âme sereine. Christophe rayonnait la vie. Elle pénétrait doucement, doucement, comme une tiédeur de printemps, à travers les vieux murs et les fenêtres closes de la maison engourdie ; elle ressuscitait des cœurs, que la douleur, la faiblesse, l’isolement rongeaient depuis des années, desséchaient, avaient laissés pour morts. Puissance des âmes sur les âmes ! Celles qui la subissent et celles qui l’exercent l’ignorent également. Et pourtant, la vie du monde est faite des flux et des reflux, que régit cette force d’attraction mystérieuse.

Deux étages au-dessous de l’appartement de Christophe et d’Olivier, habitait, comme on l’a vu, une jeune femme de trente-cinq ans, Mme Germain, veuve depuis deux ans, qui avait perdu, l’année précédente, sa petite fille, âgée de sept à huit ans. Elle vivait avec sa belle-mère. Elles ne voyaient personne. De tous les locataires de la

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