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LES AMIES

de mariage religieux : ni Olivier indifférent, ni Jacqueline la révoltée n’en avaient voulu. Christophe avait écrit pour la mairie un morceau symphonique ; mais, au dernier moment, il y avait renoncé, après s’être rendu compte de ce qu’est un mariage civil : il trouvait ces cérémonies ridicules. Il faut être, pour y croire, bien dépourvu de foi et de liberté, tout ensemble. Quand un vrai catholique se donne la peine de se faire libre penseur, ce n’est pas pour attribuer un caractère religieux à un fonctionnaire de l’état civil. Entre Dieu et la libre conscience, il n’est pas de place pour une religion de l’État. L’État enregistre, il n’unit point.

Le mariage d’Olivier et de Jacqueline n’était pas fait pour inspirer à Christophe le regret de sa détermination. Olivier écoutait, d’un air détaché, un peu ironique, le maire qui flagornait lourdement le jeune couple, la famille riche, et les témoins décorés. Jacqueline n’écoutait pas ; et furtivement elle tirait la langue à Simone Adam, qui l’épiait ; elle avait parié avec elle que « cela ne lui ferait rien du tout » de se marier, et elle était en train de gagner : à peine si elle songeait que c’était elle qui se mariait ; cette pensée l’amusait. Les autres posaient pour la galerie ; et la gale-