Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 8.djvu/90

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Il écrivait souvent, — un peu trop, — à Olivier. Il recevait de lui peu de lettres, distraites, et peu à peu plus lointaines d’esprit. Il en était déçu, mais non pas trop affecté. Il se persuadait que cela devait être ainsi ; et il n’avait pas d’inquiétude pour l’avenir de leur amitié.

La solitude ne lui pesait pas. Loin de là : il n’en avait pas assez, pour son goût. Il commençait à souffrir de la protection du Grand Journal. Arsène Gamache avait une tendance à croire qu’il possédait un droit de propriété sur les gloires qu’il s’était donné la peine de découvrir : il lui semblait naturel que ces gloires fussent associées à la sienne, comme Louis XIV groupait autour de son trône Molière, Le Brun, et Lulli. Christophe trouvait que l’auteur de l’Hymne à Ægir n’était pas plus impérial, ni plus gênant pour l’art que son patron du Grand Journal. Car le journaliste, qui ne s’y connaissait pas plus que l’empereur, n’en avait pas moins que lui

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