Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/70

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mal, les beaux mots engagent à mentir. Ils n’eurent pas trop de peine à adapter Clapier et son pacifisme à la tâche virile qu’exigeait d’eux le souffle féroce de la maison. Il s’enrôla dans la censure. Il fut officier décacheteur. Il n’était pas mauvais garçon. Il ne voulait de mal à personne. Mais comme les faibles, quand ils dévient, vont toujours plus loin que les forts, il fit du zèle, il exagéra. Il dénonça les menées du pacifisme. Il n’avait de cesse qu’il n’obligeât ses anciens compagnons à venir, comme lui, à Canossa. Un renégat est affamé de renier en compagnie. Malheur à qui lui résista ! Le bon garçon aux mains molles sentait lui pousser, au bout des doigts, les griffes de l’État. Son cœur poussif eut des battements du grand Corneille. Il fut Romain. Il était prêt à immoler — s’il en eût eu — les siens.

À ce prix, il conquit les faveurs de Brochon. Mais il ne comprit jamais pourquoi de bons patriotes, comme Annette, quand elle le voit désormais, lui tournent le dos.