Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/81

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face, qui se divertissait sans pudeur de ces maquilleurs de la paix et de la guerre, des hommes de Dieu et du Droit. Ses yeux aigus n’avaient rien perdu de l’héroïque hypocrisie des Girerd et des Bernardin, qui, pour gagner la partie engagée, trichaient avec la Croix et avec l’Idée. Il n’y avait jamais cru ; il ne croyait à rien (pour l’instant !) Ces enfants avaient pris l’écœurement des mots, des mots, que remuaient les grandes bouches, les langues pâteuses de leurs aines : la Justice et la République, le bon Dieu, des mots, des mots… clercs ou laïcs, de la même farine…

— … Ah ! le bon billet !… On ne me le « fait » pas !…

Au lieu de s’en indigner, Marc riait aux éclats. Il trouvait la bouffonnerie bonne, il était de jeu. L’idéalisme et la religion sont excellents comme poudre aux yeux, gaz asphyxiants. Le plus fort est le plus fourbe…

— Vivent nous ! Nous ne manquons pas de prédicateurs et de professeurs, de charlatans de l’Église, de la presse, du Parlement !… Fait beau mentir « pour Dieu, pour le czar, pour la Patrie ! » (Michel Strogoff). De toutes les inventions de l’homme, la plus belle, c’est les bons Dieux !…

Ce Machiavel de collège étalait avec forfanterie son cynisme qui s’amusait. Annette s’indigna