Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/86

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Il retira sa main, furieux de s’être humilié pour rien. Annette déjà faiblissait. La moindre marque de tendresse avait raison d’elle.

Elle dit :

— Si tu me promettais…

Il l’interrompit sèchement :

— Je ne promettrai rien. D’abord, tu ne me crois pas ; tu viens de le dire : tu crois que je te tromperais… Je te tromperai si peu que je te le dis en face : je recommencerai. Tu n’as pas le droit de m’empêcher.

— Vraiment ! dit Annette, je n’ai pas le droit de veiller sur tes nuits ?

— Personne moins que toi n’est qualifiée !… Mes nuits, ma vie, sont à moi !

Un mot terrible était sorti. L’avait-il compris ? Annette pâlit. Marc aussi. Leur violence à tous deux dépassait leur pensée. Mais elle ne dépassait peut-être pas les méchancetés obscures et sauvages de l’instinct, qui sait les coups qu’il porte, et les porte, d’une main sûre. Ce sont des passes d’armes, foudroyantes et muettes ; la main frappe, avant que le cerveau ait calculé ; et, par une convention tacite, aucun ne dit :

— Touché !

Mais le coup a porté, et l’âme s’envenime.

À partir de ce moment, chaque mot de discussion ne fit qu’accroître les distances. Annette