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XXII

Pour l’Internationale de l’Esprit[1]

Le généreux appel de M. Gerhard Gran ne peut rester sans écho. Je l’ai lu avec une vive sympathie. Il a une vertu bien rare, à notre époque : sa modestie. En un temps où toutes les nations affichent orgueilleusement une mission supérieure d’ordre ou de justice, d’organisation ou de liberté, qui les autorise à imposer aux autres leur personnalité sacrée — (chacune se croit le peuple élu !) — on soupire, de soulagement, à entendre l’une d’elles, par la voix de M. Gerhard Gran, parler non pas de ses droits, mais de ses « dettes ». Et avec quel noble accent de franchise et de gratitude !


« … Nous sommes parmi toutes les nations peut-être celle qui a le plus grand devoir, puisque c’est nous qui avons le plus de dettes envers les autres. Ce que nous avons reçu de la science internationale est incalculable… Nos dettes surgissent de toutes parts… Notre bilan scientifique vis-à-vis du monde ne vaut pas grand’chose ; sous ce rapport, on peut surtout parler de notre passif, et notre modestie nous interdit de rappeler notre actif… »


  1. À propos d’un Institut des Nations, dont l’idée avait été émise dans un article de la Revue Politique Internationale, de Lausanne, par M. Gerhard Gran, professeur de l’Université de Christiania. Ma réponse a paru d’abord sous le titre : « Pour une culture universelle ».