Page:Rolland - Mahatma Gandhi.djvu/130

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la coopération de tous les peuples du monde. Pour elle, l’Unité est la Vérité, et la division est Mâyâ. L’Unité est ce qui comprend tout, et par conséquent ne peut être atteinte par la voie de la négation… L’effort actuel pour séparer notre esprit de celui de l’Occident est une tentative de suicide spirituel… L’âge présent a été puissamment possédé par l’Occident. Ce n’a été possible que parce qu’à l’Occident est échue quelque grande mission pour l’homme. Nous, de l’Orient, nous avons à nous en instruire… C’est un mal sans doute que, depuis longtemps, nous n’ayons plus été en contact avec notre propre culture et que, par suite, la culture d’Occident ne soit pas placée à son véritable plan… Mais dire qu’il est mal de rester en rapports avec elle, c’est encourager la pire forme de provincialisme, qui ne produit que l’indigence intellectuelle… Le problème d’aujourd’hui est mondial. Aucun peuple ne peut faire son salut, en se détachant des autres. Ou se sauver ensemble, ou disparaître ensemble. »[1]

Comme Goethe en 1813 se refusant à haïr la civilisation française, Tagore ne peut donc admettre l’élimination de la civilisation d’Occident. Et bien que ce ne soit point le fond de la pensée de Gandhi, il sait que tel sera le sens que lui donneront les passions soulevées du nationalisme indien. Il redoute la venue de cette barbarie de l’esprit :

  1. 13 mars 1921. — Repris et développé dans l’article : L’Union des cultures (Modern Review, novembre 1921).