Page:Rolland - Vie de Tolstoï.djvu/207

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percent… Elle était sa plus ancienne foi, la reine de son art.

L’héroïne de mes écrits, celle que j’aime de toutes les forces de mon âme, celle qui toujours fut, est, et sera belle, c’est la vérité[1].

La vérité, seule épave, surnageant du naufrage, après la mort de son frère[2]. La vérité, pivot de sa vie, roc au milieu de la mer…

Mais bientôt, « la vérité horrible[3] » ne lui avait plus suffi. L’Amour l’avait supplantée. C’était la source vive de son enfance, « l’état naturel de son âme[4] ». Quand vint la crise morale de 1880, il n’abdiqua point la vérité, il l’ouvrit à l’amour[5].

L’amour est « la base de l’énergie[6] ». L’amour est la « raison de vivre », la seule, avec la beauté[7]. L’amour est l’essence de Tolstoï mûri par la vie,

  1. Sébastopol en mai 1855.
  2. « La vérité,… la seule chose qui me soit restée de ma conception morale, la seule chose que j’accomplirai encore. » (17 octobre 1860.)
  3. Ibid.
  4. « L’amour pour les hommes est l’état naturel de l’âme, et nous ne le remarquons pas. » (Journal, du temps qu’il était étudiant à Kazan.)
  5. « La vérité s’ouvrira à l’amour… » (Confessions, 1879-81.)

    — « Moi qui plaçais la vérité dans l’unité de l’amour… » (Ibid.)

  6. « Vous parlez toujours d’énergie ? Mais la base de l’énergie, c’est l’amour, dit Anna, et l’amour ne se donne pas, à volonté » (Anna Karénine, ii, p. 270).
  7. « La beauté et l’amour, ces deux raisons de vivre. » (Guerre et Paix, ii, p.285.)