Page:Rolland Clerambault.djvu/120

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La vue de ce monde en proie à la fièvre chaude eût inspiré à un sage le désir de se retirer à l’écart et de laisser passer l’accès. Mais Clerambault n’était pas un sage. Il savait seulement qu’il ne l’était pas. Il savait que parler était vain ; et pourtant, il savait qu’il lui faudrait parler, il savait qu’il le ferait. Il chercha à retarder le dangereux moment ; et sa timidité, qui ne pouvait se faire à l’idée de rester seul, aux prises avec tous, mendia autour de lui un compagnon de pensée. Ne fût-on que deux ou trois, ensemble il serait moins dur d’engager le combat.

Les premiers dont il alla discrètement tâter la sympathie étaient de pauvres gens qui, comme lui, avaient perdu un fils. Le père, peintre connu, avait un atelier, rue Notre-Dame-des-Champs. Les Clerambault voisinaient avec les Omer Calville. C’était un bon vieux couple, très bourgeois, très uni. Ils avaient cette douceur de pensée, commune à nombre d’artistes de ce temps qui avaient connu Carrière et reçu les reflets lointains du Tolstoïsme ; comme leur simplicité, elle