Page:Rolland Clerambault.djvu/65

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Clerambault et Camus échangeaient leurs pensées. Ils les échangèrent si bien que Clerambault finit par ne plus savoir ce qu’était devenue la sienne. À mesure qu’il se perdait, il avait plus impérieusement besoin d’agir : c’était une façon de s’affirmer… De s’affirmer ? Hélas ! C’était Camus qu’il affirmait. Malgré sa conviction et son ardeur habituelles, il n’était qu’un écho, — de quelles misérables voix !

Il se mit à écrire des dithyrambes de combat. C’était une émulation entre les poètes qui ne se battaient pas. Leurs produits ne risquent pas d’encombrer la mémoire de l’avenir. Rien dans leur carrière antérieure ne préparait ces pauvres gens à une tâche semblable. Ils avaient beau grossir la voix et faire appel aux ressources de la rhétorique gauloise, les poilus haussaient les épaules. Mais le peuple de l’arrière s’y plaisait beaucoup plus qu’aux récits sans lumière et englués de boue, qui lui venaient des tranchées. La vision d’un Barbusse n’avait pas encore imposé à ces ombres bavardes sa vérité. Clerambault n’eut pas de