Page:Rolland Handel.djvu/102

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art appartient à tous. Il se met à la tête d’un théâtre, il engage le combat avec le grand public, il y dépense une vitalité prodigieuse, écrivant deux ou trois opéras par an, s’épuisant à diriger une troupe indisciplinée de virtuoses déments d’orgueil, harcelé par les cabales, traqué par la faillite, usant son génie pendant vingt ans à la tâche paradoxale de faire pousser à Londres un Opéra italien, rachitique, étiolé, qui ne pouvait vivre dans un sol et un climat qui n’étaient pas faits pour lui. Au terme de cette lutte enragée, vaincu et invincible, semant sa route de chefs-d’œuvre, il devait arriver au faîte de son art, aux grands oratorios qui immortalisent son nom.

Après un voyage en Allemagne, à Hanovre, à Halle, à Düsseldorf et a Dresde, pour recruter sa troupe de chanteurs italiens[1], Hændel inaugura, au théâtre Haymarket, l’Opéra londonien, le 27 avril 1720, avec son Radamisto, qui était dédié au Roi[2]. L'affluence du public fut très grande ; mais elle était due surtout à la curiosité

  1. Ce voyage eut lieu, de février 1719 à la fin de la même année. Tandis que Hændel était à Halle, J.-S. Bach, qui se trouvait à Cöthen, à quatre milles de Halle, en fut informé ; et il alla le voir. Mais il arriva à Halle, le jour même où Hændel venait d’en repartir. — Tel est du moins le récit de Forkel.
  2. Poème de Haym. Dès 1722, l’œuvre fut jouée à Hambourg, avec traduction de Mattheson.