Page:Rolland Handel.djvu/210

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est un privilège de l’art musical moderne, et que l’orchestre de Hændel ne connaissait que de grands effets d’opposition théâtrale entre la force et la douceur. Il n’en est rien. L’échelle des nuances de Hændel est extrêmement variée. On trouve chez lui le pianissimo, le piano, le mezzo piano, le mezzo forte, un poco più F., un poco F., forte, fortissimo. On ne voit pas marqués le crescendo et le decrescendo d’orchestre, qui n’apparaissent guère, expressément notés, qu’à partir de Jommelli[1], et de l'école de Mannheim. Mais il n’y a pas de doute que la pratique n’ait précédé depuis longtemps la notation[2]. Le président de Brosses écrivait en 1739, à Rome : « Les voix, ainsi que les violons, emploient ce clair-obscur, ce renflement insensible du son, qui augmente de force de note en note jusqu'au plus haut degré, puis revient à une nuance extrêmement douce et attendrissante. » Et les exemples abondent, chez Hændel, de vastes crescendi ou diminuendi, sans que cette expression se trouve marquée sur les partitions[3].

  1. Le Dr Hermann Abert a trouvé la première indication : crescendo il forte dans l’Artaserse de Jommelli, joué en 1749, à Rome. — Au xviiie siècle, l’abbé Vogler et Schubart avaient déjà attribué l’invention du crescendo à Jommelli.
  2. Voir Lucien Kamiénski : Mannheim und Italien (Sammelbände der I. M. G., janvier-mars 1909).
  3. M. Volbach note, dans l’ouverture de Die Wahl des