Page:Rolland Le Théâtre du peuple.djvu/136

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
le théâtre nouveau

moitié vaincu. C’est le rôle du Drame social de jeter dans la balance indécise du combat le poids de l’intelligence et la force impérieuse de la raison.

Il reste bien d’autres genres dramatiques, dont le théâtre a fait jusqu’ici peu d’emploi. Le drame campagnard, poème de la Terre, imprégné de l’odeur des champs et de l’humour des provinces au parler savoureux. Pouvillon, en quelques-unes de ses tragédies pastorales ; Pottecher, en ses comédies poétiques et rustiques : le Sotré de Noël ou Chacun cherche son trésor ; le Suisse, René Morax, dans ses drames vaudois d’un vigoureux et tranquille sentiment populaire, comme la Dîme,[1] en ont donné l’exemple. Art d’un prix inestimable ; car il sauve et ranime la vie poétique des petites patries, et leur individualité qui s’efface de jour en jour. — Noterai-je aussi le drame mêlé de musique dont l’Arlésienne est un modèle admirable ? — Et pourquoi écarter dédaigneusement de notre théâtre la pantomime et l’action toute pure, que l’on relègue à présent aux cirques ? Le spectacle de l’action est d’un magnétisme trop puissant pour le bien comme pour le mal ; il serait sot de le négliger. Les jeux du cirque ont entretenu à Rome le goût de l’action, que nous perdons aujourd’hui, et qui est nécessaire aux grands peuples. Les Grecs ont cultivé tout ensemble les jeux du corps et ceux de l’âme. Faisons au corps sa place dans notre art, et que

  1. Voir plus loin, pages 146 et 147, note.