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DÉVELOPPEMENT DE L'OPÉRA ARISTOCRATIQUE EN ITALIE. 115

assurer le premier rang parmi les femmes musiciennes (quel- ques-uns vont jusqu'à dire : un des premiers parmi les musi- ciens). Ambros la traite de génie, et lui sacrifie sans hésiter son père. C'est une réelle injustice. Malgré quelques belles phrases émues, elle n'a point sa force d'accent et son sens dramatique; mais elle est plus près de nous ; elle a profité de Monteverde, et ses airs se rapprochent des formes fixes de l'opéra moderne. Elle a d'ailleurs toutes sortes de qualités féminines , une élégance de pensées, une coquetterie de réponses et de style, une finesse d'harmonie, un charme de séduction , bien faits pour le sujet et qui rappellent YArmide de Gluck, avec quelque chose de plus fluet et de plus raffiné (1). C'est un chant de printemps, le der- nier chant de la Primavera florentine, jeune comme au premier jour (2).

��Cependant le nouvel art avait étendu ses racines hors de Flo- rence. Après un moment de surprise , la mode s'en était empa- rée, et la jalousie naturelle aux villes italiennes les avait jetées aussitôt sur les traces de Florence, pour tâcher de la distancer. Bologne, avec la gloire récente de son école de peintres, ne pou- vait consentir à rester en arrière. L'opéra y pénétra vite ; mais, pas plus que les autres arts, il n'y prit une vie personnelle. Mal- gré quelques illustres exceptions (le père Martini au dix-huitième siècle), nul pays ne fit tant de musique, ne parut l'aimer davan- tage et n'en créa moins que Bologne. Ville intelligente, bour- geoise, riche et sensée, elle a toujours compris le beau, mais elle l'a mal senti. De matière un peu épaisse et douée de. peu de peu de réaction, elle a presque toujours été passive en art, adop-

��P. Cecconcelli, 1625. (Exemplaires au Conservatoire de Paris, à la Sainte- Cécile de Rome, à Crespano.)

(1) « Spectacle de princes, » s'il en fut, représenté à Poggio Impériale, dans la villa de la grande-duchesse, et dansé par les représentants les plus illustres de l'aristocratie florentine : Eleonora Strozzi, le marquis et la mar- quise Malaspina, Enrigo Concini , Costanza Ridolfi, le marquis Coppoli, le baron Vitelli, Tommaso Capponi, Franc. Mar. Guicciardini, Cos. Riccardi, Tomm. di Medici, etc.

(2) Nous pourrions parler ici de Filippo Vitali, de Florence, qui succéda, en février 1642, à Gagliano. coramo maître de chapelle. Mais ce chanteur de la chapelle Sixtine, compositeur du card. Barberini, nous semble appar- tenir plutôt à Rome , qui a toujours transforme les artistes de tous pays qui y ont vécu.

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