Page:Rolland Les origines du théâtre lyrique moderne.djvu/17

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INTRODUCTION


Le drame lyrique n’appartient pas seulement à la musique ; son histoire intéresse l’art tout entier. Dernier rameau de la Renaissance, il a, depuis trois siècles, étendu sur l’Europe son charme mystérieux. Le meilleur de la pensée allemande, jusqu’à Lessing et Gœthe, se concentre dans la musique. Son mirage recouvre la décadence de l’Italie, et le génie dramatique de la race s’y réfugie. En France, l’opéra a ruiné la tragédie et ouvert le chemin au romantisme.

Sorti d’un chimérique effort pour imiter l’art grec, le drame lyrique a été l’œuvre la plus originale peut-être de la civilisation moderne. Œuvre d’art extraordinaire qui s’efforce de rendre, non seulement l’apparence poétique de la vie, mais la vie elle-même, l’homme tout entier, l’arbre avec ses racines, le monde des passions et des sentiments obscurs, — non tels que la raison les retrouve et les classe, desséchés par l’analyse, — mais vivants, frémissants, au sein même de l’action.

Si dans l’histoire des origines qui sont l’objet de cette étude, les œuvres ne réalisent pas encore pleinement cet idéal, les germes apparaissent, la grande cathédrale sort de terre, et le plan est conçu dans la tête des premiers créateurs.

C’est à honorer leurs efforts que ce travail est consacré, — à la bonne terre italienne dont nous sommes sortis, à ce génie latin qui n’a jamais cessé d’éclairer le monde du reflet joyeux de la beauté.

Nous étudierons ici la première période du drame lyrique en Europe, période de réflexions fécondes et de recherches laborieuses, qui commence vers le milieu du seizième siècle et aboutit